Mon corps d’enfant est une feuille morte
il n’a plus d’odeur, il n’a plus d’âge que l’âge de pierre
peau séchée, il est cloporte
un tas de constellations, d’astres qui pestifèrent
et si je pouvais là subitement, derrière ma boîte crânienne éteindre la conscience,
il resterait ce corps en cadavre
il ferait nuit sans lune sur mes démences,
nuit neptune sur le circuit qui me déprave
il y aurait d’ores et déjà le tintement de mon squelette
un bruit grinçant de sous ma chair
la vie qui se débat et se secoue avec les miettes
d’un tas d’os qui même à sec, même à nu, encore espère
alors dans le tunnel d’ombre de ma cage thoracique
ce tunnel qui se gonfle alors que je respire,
je me frayerais un chemin poreux, iniatique
vers le trou noir d’entre mes jambes qui déjà tout à lui m’aspire
Mes côtes seraient la toiture qui chapeauterait ma fuite
la charpente qui camouflerait l’aube
une carapace montée sur mes orages périnéites
les murs d’une caverne qui s’effrite et s’érode
il n’y aurait plus de masque sur ma folie
plus de visage sur cette rive,
plus de soleil pour éclairer le chemin
plus que des tripes sur le qui vive
pour sillonner à tâtons, à l’instinct
il n’y aurait plus le regard baveux et rassurant des vivants
pour lécher mes tâlons sur les détours instants que j’entame, les ravins risqués que je prends …
Non, il n’y aurait plus que la nuit
La nuit, puis les orages, les orages au dedans
J‘entends cette petite voix qui fredonne
récure encore, la nuit jusqu’à l’aurore, déboulonne, dévisse
régurgite sur leur teint blafard,
secoue l’impalpable qui frétille entre tes cuisses,
invente une nouvelle histoire, brave le noir, éclipse, ellipse
alors je féconde dans mon ventre ses résidus têtards
pour mettre au monde une fiction réparatrice
je dépucelle dans mon sexe sa colonie de mémoires
je sillonne, sillonne, à la simple torche de mes abysses
là où ça crie, ça tambourine,
là où la raison vrille, la rage turbine
où je dévie, où ils résinent
là où mon ombre prie, mon ombre tapine
dans ce creux précis réinventer l’aurore
un jour pérenne, un jour sans fin
je déchirerai la nuit sous le nombril de sous mes pores
on pilotera l’éveil dans la cambrure de nos reins